vendredi 21 mai 2010

"Du poison dans l'eau" Réponse de Sophie Le Gall

Bonjour

Dans notre article précédent, nous indiquions que nous avions pris contact avec la société de production "Ligne de Mire" qui a financé le film « Du poison dans l’eau potable » de Sophie Le Gall. Nous voulions en effet leur donner notre point de vue sur la façon dont cette dernière a traité dans son enquête la question de la pollution à l’aluminium de l’eau potable dans certaines communes françaises.

Nous avons reçu une réponse très rapide et c'est la réalisatrice elle-même qui a pris la plume pour réagir au courrier de Pornichet Forum :
Voici un extrait de son courrier :
" [...] Sur l'analyse aluminium concernant Saint-Nazaire, il est bien précisé dans notre commentaire, (comme vous le soulevez d'ailleurs) que nous parlons de dépassement ponctuel (le mot ponctuellement est utilisé). Le but de cette infographie qui regroupait 5 communes, était de montrer que même dans les grandes villes qui ont d'avantage de moyen pour traiter leur eau et la contrôler, il est compliqué d'être en permanence sous la norme.
L'autre ambition état de montrer que le ministère de la Santé ne nous a donné qu'un chiffre sur les dépassements (2 millions 700 000 personnes ont bu au moins une fois une eau qui dépassait la norme Alu en 2007) sans nous en dire
plus. Les communes citées étaient donc des communes que nous avions trouvées au gré de nos recherches.
Par ailleurs, nous avons bien dissocié les deux petites communes du début qui ont des dépassements réguliers des autres grandes villes de l'infographie. Pour moi, elles ne sont évidemment pas à être mises sur le même plan.
Pour preuve, quand nous interrogeons des toxicologues ou l'Afssa pour savoir ce que risque les gens en buvant une eau régulièrement contaminée à l'aluminium, les analyses que nous leur soumettons sont celles des deux petites communes du début et non celles des grandes villes.
Nous n'avons jamais associé dans le commentaire les dépassements dans les grandes villes avec d'éventuels risques sanitaires.
Encore une fois, notre intention était de montrer qu'il était compliqué pour les stations de traitement d'avoir une eau en dessous des normes en permanence.
L'histoire d'Eau de Paris le démontre bien. Ils sont passés aux chlorures ferriques parce que les hôpitaux parisiens ne souhaitaient pas que la ville délivrent une eau au delà de 50µg/l pour leurs dialysés (dans les années 70, des études avaient mis en évidence que l'aluminium dans l'eau pouvait être responsable de démence chez les dialysés). Ce que m'expliquait les responsables d'Eau de Paris, c'est qu'en utilisant l'aluminium on ne pouvait jamais être sûr
d'être en permanence en dessous des 50µg/l, voilà pourquoi ils avaient abandonné le procédé.
[…]"



Il n’en reste pas moins que la méthode employée, très approximative à ce moment du film, jette le doute sur l’ensemble de l’enquête.
Cela nuit aux objectifs louables et salutaires du départ, notamment celui de dénoncer les effets sur l’environnement  et sur la santé humaine des nitrates et des différents pesticides utilisés depuis des décennies dans l’agriculture intensive.

En tant que journaliste, elle sait l’impact d’une telle annonce sur la population. Le fait d’associer Saint Nazaire aux villes dans lesquelles l’eau distribuée est effectivement impropre à la consommation du point de vue des polluants chimiques peut laisser penser qu’elle a ajouté, à la liste des petits villages, une grande ville dans le seul intérêt d’apporter du crédit au message. En avait-elle besoin ?

Enfin, le fait que sa « défense » repose sur l’emploi du terme « dépassements ponctuels » n’est pas recevable en l’espèce. Cela sous entend en effet que ce taux, très au dessus des normes, est relevé « ponctuellement » sur l’agglomération nazairienne, ce qui est inexact puisque ce n’est arrivé qu’une seule fois.

Les enjeux sont trop grands pour se permettre de jeter le discrédit sur l’ensemble des œuvres permettant de faire prendre conscience  de  la nécessaire conversion écologique de nos sociétés.
Face aux risques que représentent le dérèglement climatique, la destruction des ressources halieutiques et la pollution  de nos océans, l’atteinte dramatique à la biodiversité, les dégâts sur l’environnement et la santé humaine de l’agriculture intensive…, il faut agir de manière responsable et faire preuve de la plus grande rigueur.
Car tous ceux qui ont intérêt à dénigrer et ridiculiser le message écologiste (les lobbies de la pétrochimie, tous les « Monsanto », les « Total » et autre  « BP », les « Claude Allègre » en mal de reconnaissance…) sont toujours promptes à s’engouffrer dans  les moindres failles pour contrer le discours écologiste et continuer ainsi à faire de l’argent.

C’est dommage car Sophie Le Gall avait déjà remporté un pari : réussir à faire passer son film à 20h35 sur une chaine de grande écoute.
De plus, sa façon de faire son métier sur le terrain montre sa grande pugnacité et sa détermination à rendre publique ce que chaque citoyen a le droit de savoir. Quand les enjeux économiques se placent au dessus de tout le reste, il faut des « Sophie Le Gall » pour les contrer.
La réalisatrice a sans aucun doute une conviction sincère de l’utilité du journalisme pour faire avancer la cause écologiste.
Nous ne voulons pas lui faire un procès d’intention. C’est une erreur qu’elle a faite, assurément. C’est regrettable mais il n’en demeure pas moins que l’on aimerait voir plus souvent ce genre de documentaires à la télévision.
Nous lui souhaitons de pouvoir poursuivre son travail et de continuer à nous offrir d’autres films sur des sujets aussi cruciaux que celui-ci.

C’est ce que nous lui avons dit en substance dans la réponse que nous lui avons adressée.

Michael NICOSIA
Président de l'’association Pornichet Forum.

mercredi 19 mai 2010

"Du poison dans l'eau du robinet" Pornichet Forum a voulu en savoir plus...

France 3 a diffusé lundi 17 mai 2010 à 20h35 le film ''Du poison dans l'eau du robinet''
Sophie Le Gall, la réalisatrice de ce documentaire d’investigation a parcouru la France pour recueillir les preuves de la contamination de l'eau potable et interpeller les autorités.

Le film, passionnant autant qu'inquiétant, montre que dans certaines régions, l’eau du robinet regorge de  polluants comme les pesticides, les nitrates, les traitements chimiques bien au delà des normes en vigueur.  Et que partout en France, on retrouve à la sortie des stations d'épuration des quantités importantes de résidus de médicaments (aspirine, psychotropes,  pilule contraceptive...) qui sont donc rejetés dans les eaux usées et se retrouvent dans nos rivières avec toutes les conséquences qui en découlent.
Les autorités le savent mais elles délivrent régulièrement des dérogations qui permettent de distribuer une eau non conforme et qui potentiellement, à long terme, peut provoquer des problèmes de santé très graves (cancers, maladie d'Alzheimer, etc.)


Dans la partie consacrée à la présence d'aluminium dans l'eau du robinet (l'aluminium sert à débarrasser l'eau des impuretés en suspension, ce qu'on appelle la "floculation"), la journaliste donne des exemples de ville où les taux sont très nettement supérieurs à la norme en vigueur. En effet, alors que cette dernière fixe le taux maximum à ne pas dépasser à 200 pg/l,* la ville de Saint Nazaire apparait en grand, sur la carte de France présente à l'écran, avec un taux de 460 pg/l, "ponctuellement relevé" !


En tant qu'association écologiste, nous avons souhaité nous renseigner pour en savoir plus. Nous pensons en effet que c'est un des rôles d'une association comme la nôtre que d'informer les pornichétins sur des questions aussi cruciales que la qualité de l'eau que l'on boit tous les jours.
Nous sommes donc tout d'abord passés en mairie de Pornichet, mercredi 19 mai, pour consulter le document relatif à la qualité de l'eau distribuée aux habitants, document que les maires sont obligés par la loi de rendre publique.
La personne qui nous a reçus nous indique qu'ils n'ont pas ce document et qu'ils l'ont demandé à la Carène suite aux réactions de nombreux pornichétins qui ont fait la même démarche que nous depuis la veille (sans doute, désormais, ce document sera affiché...).
Elle nous donne le n° du service de l'eau de la Carène pour que nous les appelions, ce que nous faisons. Une personne nous répond qu'elle préfère prendre nos coordonnées pour que le responsable nous rappelle... ce que cette personne fait dans les 10 minutes qui suivent.
Et là, ce monsieur nous explique très clairement que toutes les analyses (qui sont consultables sur le site de la Carène, et que nous avons consulté pour en avoir le coeur net) montre un taux moyen de 45 pg/l d'aluminum dans l'eau distribué sur les communes de la Carène. A Pornichet, le taux était même en moyenne, en 2008, de 32 pg/l , soit 6 fois en dessous de la norme.
Le 22 décembre, il y a bien eu c'est vrai, au relevé de la Clinique de l'Europe, un taux de 460 pg/l. Mais ailleurs, dans tous les autres points de relevé, ce taux était autour de 30-35 pg/l. Le responsable du service nous indique que la DDASS a considéré ce taux, au regard des centaines de prélèvement sur l'année qui montre un taux très en deça de la norme, comme non probant.


C'est donc bien une eau de qualité que la Carène distribue aux habitants des 10 communes qui la composent. Le raccourci employé par la journaliste à ce moment là de l'émission jette le doute sur l'ensemble de son film. 
C'est dommage car celui-ci pose de vraies questions de société (modèle d'agriculture, rôle du politique, démocratie, etc.)

Nous avons contacté "Ligne de Mire" la maison de production de ce documentaire pour leur signaler notre déception et surtout notre interrogation sur la fiabilité des informations fournies tout au long du film.

Nous attendons leur réponse... que vous trouverez sur notre blog quand nous l'aurons obtenue.


L'association Pornichet Forum.

* Il faut lire "picogramme d'aluminium par litre d'eau"